Louise Michel, icône du combat révolutionnaire
Christine Bard
[Il existe une] photographie de Louise Michel (1830-1905) [qui] est un des rares témoignages visuels contemporains de son combat pendant la Commune de Paris. Elle y est vêtue d'un uniforme.
Louise Michel a effectivement combattu les armes à la main. Après la proclamation de la Commune, le 28 mars 1871, elle se bat pendant deux mois, avec intrépidité, jusqu'à la fin. L'ancienne institutrice l'avoue dans ses Mémoires : « Oui, barbare que je suis, j'aime le canon, l'odeur de la poudre, la mitraille dans l'air, mais je suis surtout éprise de la révolution » source .
Pendant la semaine sanglante, des centaines d'insurgé-e-s sont tué-e-s.Contre la libération de sa mère prise en otage, Louise Michel se rend aux autorités le 24 mai. A son procès, voilée de noir, elle plaide coupable et réclame sa « part de plomb ». Elle sera condamnée à la déportation en Nouvelle Calédonie. Jusqu'à son retour en métropole en 1880 grâce à l'amnistie générale, s'écoule une petite décennie qui en fait une allégorie de l'insoumission.Elle est connue grâce à de nombreuses photographies, la plus diffusée étant celle d'Eugène Appert, prise dans les prisons de Versailles, mais aussi par des peintures, des sculptures, des gravures et des caricatures.
Certaines veulent souligner l'androgynie de la « vierge rouge », d'autres en font au contraire une gaillarde dépoitraillée. Vieille, elle sera souvent enlaidie, parfois esquissée comme une légende sans consistance physique.Cette photographie de Louise Michel en fédéré tranche radicalement avec toute cette iconographie. Elle maîtrise l'image qu'elle va donner d'elle, face à un photographe ami. Son visage est grave, la pose est étudiée : dignité du vêtement militaire (l'uniforme des hommes, bien boutonné), détermination dans l'action (la main sur le ceinturon).
Ce n'est pas la première fois qu'elle se travestit : elle s'habille en homme lors de la manifestation qui accompagne l'enterrement de Victor Noir (« J'étais en homme pour ne pas gêner ni être génée », La Commune, histoire et souvenirs). Dans ses Mémoires, elle raconte aussi, qu'enfant, « voyant depuis longtemps la supériorité des cours adoptés dans les collèges sur ceux qui composent encore l'éducation des filles de province, j'ai eu bien des années après l'occasion de vérifier la différence d'intérêt et de résultat entre deux cours faits sur la même partie: l'un pour les dames, l'autre pour le sexe fort ! J'y allai en homme, et je pus me convaincre que je ne me trompais pas » (source).
Merci à Véronique Fau-Vincenti qui a effectué ces recherches.
(article emprunté à Musea - http://musea.univ-angers.fr - dec. 2005)
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